Cours Le cerveau, un organe fragile à préserver

Exercice - L'oeil et le cerveau

L'énoncé

« Le 16 août 1951, une hystérie collective frappe Pont-Saint-Esprit, petit village paisible du Gard. Tout commence par une mystérieuse intoxication alimentaire collective. Les salles d’attente des deux médecins ne désemplissent pas. Près d’une vingtaine de malades viennent consulter pour des problèmes digestifs : nausées, vomissements, frissons, bouffées de chaleur. Les jours suivants, les symptômes s’aggravent et mutent en crises hallucinatoires insupportables. Les comptes rendus de l’époque décrivent la petite bourgade comme un enfer dantesque. Transportés à l’hôpital sur des charrettes ou des voitures, les malades hurlent, gémissent et s’insultent. D’autres, la bave aux lèvres, terrorisés par le bruit des sirènes des ambulances, déambulent dans les rues. Bêtes immondes, chimères et flashes colorés peuplent leurs délires, lorsque ce ne sont pas les flammes ou les voix d’outre-tombe.

Pour expliquer l’ensemble des symptômes, on parle d’abord de pain infecté par l’ergot de seigle, sans pour autant parvenir à une certitude scientifique. D’autres hypothèses se succèdent, parmi lesquelles celle d’un journaliste américain qui prétendra avoir percé le mystère.

Selon lui, la CIA (l’Agence centrale du renseignement américain) se serait purement et simplement servie de la population de Pont‐Saint-Esprit pour étudier les effets de l’utilisation du LSD comme nouvelle arme de guerre en pulvérisant cette drogue sur le village et les champs de blé avoisinants. »

Source : www.lepoint.fr

 

L’ergot (Claviceps purpurea) est un champignon qui infecte le seigle et d’autres céréales. Bien visible sur la plante en herbe où des grains se teintent en noir, l’ergot se transforme en poudre rouge lorsqu’il est écrasé par les meules, passant facilement inaperçu dans la farine de seigle de teinte foncée.

L’ergot produit une substance toxique, l’ergotamine, à l’origine d’intoxications graves. Les symptômes comprennent des crises de convulsions et des spasmes douloureux, des diarrhées, des maux de tête, des nausées et des vomissements. Il peut exister des hallucinations visuelles et auditives.

 

Document 1 : Modèle moléculaire de l’ergotamine (obtenu avec le logiciel rastop)

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Document 2 : La transmission du message nerveux au niveau des voies visuelles

A) Trajet du message nerveux

Une molécule, la sérotonine, est présente au niveau du relais cérébral.

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B) Modèle moléculaire d’une molécule de sérotonine fixée à son récepteur spécifique (en grisé) situé sur le neurone B

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C) Photo prise au niveau d’une synapse située dans le relais cérébral (microscope électronique : G × 10 000)

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Document 3
 : Le LSD (acide lysergique diéthylamide)

Le LSD, dont le modèle moléculaire est représenté ci-dessous, est une drogue de synthèse responsable d’hallucinations visuelles et auditives, ainsi que des troubles locomoteurs et respiratoires accompagnés de nausées et de vertiges. Elle est responsable de troubles psychiatriques et peut déclencher des maladies mentales durables dès la première prise.


Question 1

On s’intéresse au mode d’action de la sérotonine dans le cerveau.
 Choisir la proposition exacte et expliquer.

L’étude du document 2 permet d’affirmer que la sérotonine :

- transmet en continu le message nerveux visuel du neurone A vers le neurone B.

- stoppe la transmission d’un message nerveux visuel en se fixant sur le neurone A.

- transmet le message nerveux visuel en se fixant au niveau de la membrane du neurone B.
- stoppe la transmission du message nerveux visuel une fois libérée dans l’espace entre les neurones A et B.

L’étude du document 2 permet d’affirmer que la sérotonine transmet le message nerveux visuel en se fixant au niveau de la membrane du neurone B (réponse 3).

En effet, le document 2 rappelle que les voies visuelles sont constituées de neurones A, formant les nerfs optiques, qui sont les neurones ganglionnaires issus des rétines. Puis, il y a un relai cérébral, où ces neurones passent le message par voie synaptique aux neurones B qui le portent jusqu’au cortex visuel.

Par ailleurs, une microscopie électronique nous montre que, lors de la transmission synaptique, des molécules de neurotransmetteur (sérotonine) initialement présentes dans l’extrémité du neurone A sont émises dans la fente synaptique, puis se fixent sur des récepteurs spécifiques situés sur le neurone B afin de déclencher le message nerveux.

Question 2

Dans la littérature scientifique évoquant les conséquences de l’usage de drogues, le phénomène de « flash-back » est souvent évoqué. Choisir la proposition exacte.

Le « flash-back » est :
- une réapparition des effets du LSD plusieurs jours, voire mois, après sa consommation.
- observable seulement lorsque la drogue consommée est du LSD.
- sans impact sur le fonctionnement de l’organisme lors de la première consommation de LSD.
- la conséquence de l’élimination totale par l’organisme du LSD consommé.

Le «  flash-back  » est une réapparition des effets du LSD plusieurs jours, voire mois, après sa consommation. Cette donnée fait en principe partie de vos connaissances, et fait appel à votre bon sens (invalidation des autres propositions).

Question 3

Actuellement, le mystère sur le pain maudit de Pont-Saint-Esprit reste entier. Aucune des deux hypothèses n’a été validée. Expliquez en quoi ces deux hypothèses étaient scientifiquement fondées. Vous pouvez répondre en complétant si besoin tout ou partie des figures ci-après.

Modèle moléculaire de l’ergotamine

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Modèle moléculaire du LSD

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Modèle moléculaire de la sérotonine

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La première hypothèse expliquant l’hallucination collective de Pont-Saint-Esprit est la consommation de pain infecté à l’ergot de seigle qui, d’après le document 1, contient une substance toxique provoquant notamment des hallucinations visuelles  : l’ergotamine.

La deuxième hypothèse est celle d’une utilisation par la CIA de la population locale comme cobaye pour tester l’effet du LSD, drogue provoquant entre autres des hallucinations visuelles (document 3).

En effet, on observe que la sérotonine, l’ergotamine et le LSD, possèdent une partie commune dans leur modèle moléculaire, cette partie étant justement celle se fixant sur les récepteurs à la sérotonine (document 2B)  :

  

Modèle moléculaire de l’ergotamine

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Modèle moléculaire du LSD

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Modèle moléculaire de la sérotonine

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On sait que la fixation de la sérotonine sur les récepteurs des neurones B déclenche sur ceux-ci un message nerveux se propageant jusqu’au cortex visuel, qui l’interprète alors comme une image.

On conclut que le LSD et l’ergotamine peuvent tous deux se fixer sur ces mêmes récepteurs et déclencher l’impression de vision, même si les neurones A ne sont pas activés (et ne libèrent pas de sérotonine), provoquant ainsi des hallucinations visuelles.

Les deux hypothèses sont donc plausibles, bien que la deuxième soit tout à fait «  politiquement incorrecte  ».