Cours Le portrait charge

Exercice - Portrait d'Arrias, La Bruyère

L'énoncé

Jean de la Bruyère, Les Caractères, De la société et de la conversation, 1688.

En 1684, La Bruyère devient précepteur du duc de Bourbon, petit-fils du prince de Condé. Il publie en 1688 un petit livre au succès immédiat, Les Caractères, qui dresse, au travers de portraits et de réflexions, un tableau satirique de la société et de la Cour à l'époque de Louis XIV. Il irronise ici sur Arrias, le beau parleur. 

Arrias a tout lu, a tout vu, il veut le persuader ainsi ; c'est un homme universel, et il se donne pour tel : il aime mieux mentir que de se taire ou de paraître ignorer quelque chose. On parle à table d'un grand d'une cour du Nord : il prend la parole, et l'ôte à ceux qui allaient dire ce qu'ils savent ; il s'oriente dans cette région lointaine comme s'il en était originaire ; il discourt des mœurs de cette cour, des femmes du pays de ses lois et de ses coutumes ; il récite des historiettes qui y sont arrivées ; il les trouve plaisantes, et il en rit le premier jusqu'à éclater. Quelqu'un se hasarde de le contredire, et lui prouve nettement qu'il dit des choses qui ne sont pas vraies. Arrias ne se trouble point, prend feu au contraire contre l'interrupteur : "Je n'avance rien, lui dit-il, je ne raconte rien que je ne sache original : je l'ai pris de Sethon, ambassadeur de France dans cette cour, revenu à Paris depuis quelques jours, que je connais familièrement, que j'ai fort interrogé, et qui ne m'a caché aucune circonstance." Il reprenait le fil de sa narration avec plus de confiance qu'il ne l'avait commencée, lorsque que l'un des conviés lui dit : "C'est Sethon à qui vous parlez, lui même, et qui arrive fraîchement de son ambassade."

 

Répondre aux questions suivante en justifiant par des citations.


Question 1

Quels sont les traits de caractère principaux d’Arrias ?

Arrias est orgueilleux, en effet il est excessivement satisfait de lui-même et ne doute de rien : « Arrias a tout lu, a tout vu » ; « il prend la parole, et l'ôte à ceux qui allaient dire ce qu'ils savent ». Il monopolise donc la conversation, sans écouter les autres, ce qui peut être perçu comme de l’égocentrisme : « il récite des historiettes qui y sont arrivées ; il les trouve plaisantes, et il en rit le premier ». On peut ajouter à cela qu’il est beau parleur : « il aime mieux mentir que de se taire ».

Question 2

En quoi ce portrait est-il une caricature ?

Ce portrait est une caricature car il amplifie les traits de caractère d’Arrias. De plus on y trouve les figures de styles propre à la caricature ou au portrait charge : avec l’accumulation qui illustre son discours présomptueux : « il prend la parole (…) il discourt des mœurs (…) il récite des historiettes, ; il les trouve plaisantes (…) il en rit ». Il se met également en avant avec la répétition de « je » : « Je n'avance rien, (…) je ne raconte rien que je ne sache original : je l'ai pris de Sethon, etc. ». Le texte contient aussi des hyperboles : « tout lu » ; « tout vu » ; « un homme universel » ; « jusqu'à éclater » ; « avec plus de confiance ».

Relève les figures de style associées à ce genre.

Question 3

Comment est dénommé, dans un premier temps, celui qui contredit Arrias ? Quelle est ici l'intention de l'auteur ?

Celui qui le contredit est appelé « l’interrupteur », car Arrias ne le considère pas comme quelqu’un méritant d’avoir une identité propre, il n’est que celui qui à l’audace de l’interrompre dans son récit. Il le désigne comme un objet avec l’article défini « l’ ». L’auteur choisit ce procédé pour créer un suspens et contraster avec la fin où l’on apprend que l’interrupteur est Sethon. Initialement aux yeux d’Arrias il n’est donc personne, puis finalement, il devient celui par lequel son mensonge va être démasqué.

Il est dénommé « l’interrupteur ».

Question 4

Quels effets les deux dernières phrases produisent-elles ? Pourquoi pourrait-on parler d'un dénouement ?

Les dernières phrases produisent la surprise, alors qu’Arrias reprend de plus belle son discours : « Il reprenait le fil de sa narration avec plus de confiance qu'il ne l'avait commencée », un convive lui annonce que Sethon se trouve devant lui. Le texte s’arrête là, comme s’il n’y avait plus rien à ajouter : Arrias reste sans voix. Une seule petite phrase met à mal tous ses longs discours. Cela provoque le dénouement de l’histoire, le portrait se clos sur cette révélation et Arrias et ainsi puni pour son orgueil.

Question 5

Pourquoi ce portrait figure-t-il dans le chapitre intitulé « De la société et de la conversation » ? A quelle catégorie sociale Arrias appartient-il ?

Ce portrait figure dans « De la société et de la conversation », car il caricature un homme de la haute société dont un des passe temps de l’époque est de faire de l’esprit en maniant la langue avec subtilité. Arrias appartient à cette classe sociale, on le voit dans ce texte, il participe a un dîner mondain : « On parle à table d'un grand d'une cour du Nord ». Il est question des affaires du haut monde : « ambassadeur de France » ; « mœurs de cette cour ». Arrias est donc une caricature de certains hommes que l’on doit trouver dans ce genre de dîner.

Question 6

Pourquoi peut-on dire que c’est un portrait satirique ? A quoi sert-il ?

La Bruyère dresse ici un portrait satirique d’Arrias pour se moquer de lui et de tous ceux qui agissent de la sorte dans la haute société. Il utilise donc les figures de style de l’accumulation, de la répétition et de l’hyperbole qui confèrent un registre satirique au texte tant cela montre l’exagération dont fait preuve le personnage qui devient une vraie caricature de lui-même. Le personnage est tourné en ridicule de par son comportement excessif et notamment par ce qui lui arrive à la fin lorsqu’il est humilié devant tout le monde.

 

Pour rappel, le registre satirique vise à critiquer un événement, un groupe social ou un caractère, par la moquerie, la raillerie.