Cours La Princesse de Clèves, La Fayette

Dissertation - La Princesse de Clèves, La Fayette

L'énoncé

Dans La Princesse de Clèves, le personnage principal explique : « Les passions peuvent me conduire, mais elles ne sauraient m’aveugler. » Est-ce une manière de dire que le roman propose une leçon morale sur les passions ?

Vous répondrez à la question en vous appuyant sur les textes étudiés en classe, sur votre connaissance du roman, et sur votre culture personnelle.


Question 1

Analyser les termes du sujet.

- syntaxe révélatrice : « me » COD de « conduire » et « sauraient », le personnage subit la passion => constat sur la nature humaine. Vision pessimiste ?

- « conduire » : la Princesse est soumise à ses passions, selon la citation. En effet par définition, la passion s’impose au sujet qui est « passif ».

- on retrouve le conflit passion/raison. Ici, la raison permet la lucidité du personnage. Ceci rappelle la dimension introspective de l’œuvre.

 

Paradoxe : dans le roman, la conduite du personnage va bien à l’encontre les passions qui la conduisent.

Un sujet de dissertation comporte souvent un problème, un paradoxe. C’est là qu’on va trouver le moyen de le reformuler en problématique.


Il faut partir d’une définition des termes du sujets pour bien cerner ses contours, ses enjeux, et éviter le hors sujet.

Question 2

Elaborer une problématique.

Si sa passion s’impose à la Princesse, sa lucidité ne lui permet pas d’orienter sa conduite selon la raison ?

Servez-vous du paradoxe mis en lumière à la question précédente.

Question 3

Rédiger une introduction.

La Princesse de Clèves de Mme de La Fayette (1671) fait partie de ces romans d’amour qui ont marqué la littérature française, bien que l’histoire de la passion de la Princesse et du duc de Nemours ne se concrétise jamais. Et en effet, l’histoire de ce roman, c’est l’histoire d’un personnage qui résiste à son inclination, et l’intrigue raconte moins les étapes de la séduction entre les deux personnages, que l’intrigue intérieure qui se joue chez la Princesse. C’est ainsi qu’elle affirme au cours du roman :  « Les passions peuvent me conduire, mais elles ne sauraient m’aveugler. » Constat donc classique d’une opposition entre la raison lucide et la passion qui emporte. Mais cependant, en lisant le roman, le lecteur ne peut manquer de voir combien sa passion ne « conduit » pas entièrement la Princesse, puisqu’elle y résiste tant que faire se peut, certes avec difficultés et sentiments de culpabilité. Aussi, nous essaierons de montrer comment, si la passion s’impose bien à la Princesse, sa lucidité ne lui permet pas d’orienter sa conduite selon la raison. Pour ce faire, nous montrerons combien La Princesse de Clèves est un roman qui illustre le conflit raison/passion qui a alimenté les réflexions du Grand Siècle, souvent en faveur de la raison. Cependant, c’est aussi un roman d’amour, et le constat que les passions emportent les hommes est aussi le moyen de dépeindre la force de l’amour. Ainsi, il s’agira de montrer in fine que le roman est avant tout moraliste : il propose une analyse du cœur humain, sans imposer forcément une morale nette au lecteur.

Rappel des 4 étapes :

- l’amorce (facultative mais bienvenue)

- la présentation du sujet en lien avec l’œuvre et le parcours au programme

- la problématique

- l’annonce du plan

Question 4

Proposer un plan détaillé.

I. Un roman classique : la visée didactique de la représentation du conflit raison/passion

 

Nous montrerons ici comment le roman se positionne dans la représentation classique du conflit raison/passion.

 

1. Un débat classique qui obsède le Grand siècle

On pourrait commencer par rappeler comment ce débat est lié à son époque. L’idée est que vous puissiez utiliser des textes de lectures analytiques.

Ex : les Maximes de La Rochefoucauld, ou La Bruyère par exemple

Pensez à utiliser vos textes complémentaires pour les dissertations. Si vous n’avez pas étudié de texte sur le conflit raison/passion, pas de panique ! un sujet peut donner divers plans, et cette sous-partie n’est qu’un exemple d’organisation du propos.

2. La Princesse de Clèves : un roman structuré autour de la morale de Mme de Chartres, qui oriente d’emblée le débat en faveur de la raison

L’importance de la parole de la mère de la Princesse au début du roman.

Il est bon de maîtriser ce passage qui est structurel dans l’œuvre.

3. Le spectacle des dangers de la passion : la fonction des récits enchâssés

Les récits enchâssés ne sont pas des digressions inutiles mais bien des mises en abyme des ravages de l’amour, qui servent de contre-modèles pour la Princesse.

Dans le sujet, on peut entendre également une critique de la Princesse contre ceux qui suivent aveuglément les passions. Et en effet, les récits enchâssés sont aussi le moyen de faire la satire d’une société de cour qui renvoie également à celle du XVIIe siècle.

En exemple, détaillez un de ces récits que vous maîtrisez. Choisir un récit enchâssé à retenir dans les grandes lignes pour les dissertations, en connaissant aussi sa place dans le recueil (puisqu’il est lié à l’itinéraire de la Princesse).

Bilan de la partie et transition : si le roman dépeint les tourments de la passion, l’amour n’est pas totalement condamné pour autant par le roman. Le Prince de Clèves par exemple est une figure d’amoureux dont la passion n’est pas peinte de manière condamnable. Le duc de Nemours n’est pas peint comme un Grand méchant homme. Le roman est aussi et avant tout un roman d’amour, fait pour plaire à un public séduit par les intrigues amoureuses.

 

II. Un roman précieux : un roman d’amour et sur l’amour avant tout

 

1. La Préciosité : un intérêt pour le thème de l’amour

Le roman est un roman précieux, or la préciosité a fait de l’amour un de ses thèmes privilégié et a chercher à définir les différents types d’amour, pour concevoir un amour idéal.

Exemple : la Carte de Tendre.

2. Un grand roman d’amour

Le roman raconte moins une leçon sur les passions que le récit d’un amour qui ne débouche pas sur un « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants ». La veine « réaliste » du roman donne au lecteur la possibilité d’apprécier une histoire qui est à la fois extraordinaire (voire invraisemblable, si on se rappelle la scène de l’aveu de la Princesse à son mari, à laquelle Nemours assiste !) mais ancré dans une trame historique qui gomme l’artifice de la fiction.

Aussi une lecture qui privilégie le plaisir à lire les peintures de l’amour plutôt que le triomphe de la raison est envisageable. En exemple, prendre un passage précis de la trajectoire amoureuse des deux personnages (le portrait, le ruban, l’aveu…)

3. La peinture d’un amour idéal, celui d’un amour qui ne se réalise pas ?

Selon la vision de la Préciosité de l’amour, Mme de La Fayette semble donc donner un sens symbolique à la fin amère de son roman. Mme de Clèves représente celle qui préfère un amour qui dure éternellement et sans déboires : celui qui ne se réalise pas. Autrement dit, la seule passion qui ne tourne pas mal est celle à laquelle on résiste.

Bilan de la partie : c’est un roman qui n’impose pas son sens : chaque lecteur le lit comme il le souhaite, et il est possible de prendre le parti du duc de Nemours par exemple. Ainsi le roman propose davantage une réflexion sur les passions qu’une leçon morale sur les passions. On a affaire à une réflexion sur la nature humaine finalement.

 

III. Un roman d’analyse : un discours moraliste sur la nature humaine

 

Rappel : moraliste : qui analyse la condition humaine en observant les mœurs de son temps.

Dans la citation, la Princesse observe ce qui se joue en elle : c’est cette lucidité qui lui permet d’échapper aux ravages de la passion.

 

1. Une analyse fine du fonctionnement du cœur humain

A travers les différents récits enchâssés, la passion du Prince pour sa femme, la passion de Nemours et de la Princesse, le roman offre diverses représentations de l’amour pour fournir une somme qui peut se lire comme le miroir du cœur humain.

On pourra aussi se reporter à un autre texte de Mme de La Fayette, comme La Princesse de Montpensier, pour montrer comme l’auteur a dépeint au fil de son œuvre les mécanismes de la passion.

2. Le constat d’une nature qui ne peut échapper au trouble amoureux

Montrer comment la Princesse se représente bien comme étant conduite par ses passions.

Exemple : la découverte de la lettre et la découverte de sa jalousie.

3. « les passions ne sauraient m’aveugler » : l’importance de l’introspection, de l’analyse dans le roman

Roman psychologique : modernité de La Princesse de Clèves qui offre au lecteur la possibilité d’y voir son reflet et de réfléchir sur ses propres aveuglements.

Tout texte dans lequel la Princesse s’analyse est bon à utiliser comme exemple.

Servez-vous de vos lectures analytiques comme exemples précis et détaillés, mais retenez aussi des exemples plus personnels que vous avez particulièrement appréciés. Ils rendront votre copie plus intéressante car différente des autres.


Etant donné le parcours de lecture « Individu, morale et société », vous devez connaître les enjeux littéraires du roman d’analyse (roman psychologique/d’introspection), la dimension satirique de la cour (c’est un roman historique à bien des égards), les notions de préciosité, de littérature moraliste, et de littérature classique.

Question 5

Rédiger une conclusion.

Il s’agit donc d’un roman moraliste plutôt que moralisateur, qui invite le lecteur à bien lire : bien lire le roman, mieux lire en lui-même.

En ouverture : faire un lien avec Phèdre, le personnage de Racine, conduite elle-aussi par ses passions, lucide sur ses tourments, mais au destin bien plus funeste que celui de la Princesse ?

 

Pensez aux autres textes et autres œuvres étudiés au cours de l’année pour vos ouvertures.